Vous résumerez le texte suivant en 100 mots (± 10 %), en ne
vous attachant qu'aux grands mouvements de la pensée.
Vous indiquerez, en tête de votre copie, le nombre de mots
utilisés.
1/ Qu'évoque pour vous le nom de l'auteur ? Situez-le dans l'histoire. (1 point)
2/ Freud évoque la loi du plus fort. A quels penseurs, écrivains, critiques ou hommes d'Etat, peut-il faire référence ? (1 point)
3/ Donnez un synonyme d' « éthique » et de « patente ». (1 point)
4/ Donnez deux exemples historiques qui peuvent illustrer la phrase : « quand une communauté humaine sent s'agiter en elle une poussée de liberté, cela peut répondre à un mouvement de révolte contre une injustice patente, devenir ainsi favorable à un nouveau progrès culturel et demeurer compatible avec lui. » (1 point)
Pensez vous avec Freud que « la persistance d'un reste de l'individualisme indompté » se dirige contre certaines formes ou certaines exigences culturelles ou bien même contre la civilisation ? Justifier votre réponse en vous appuyant sur des exemples précis tirés notamment des trois oeuvres au programme.
Votre devoir ne devra pas excéder 80 lignes.
Il sera tenu le plus grand compte de la présentation générale et de l'orthographe.
Le dernier, mais certes non le moindre trait caractéristique d'une civilisation, apparaît dans la manière dont elle règle les rapports des hommes entre eux. Ces rapports, dits sociaux, concernent les êtres humains envisagés soit comme voisins les uns des autres, soit comme individus appliquant leurs forces à s'entraider, soit comme objets sexuels d'autres individus, soit comme membres d'une famille ou d'un Etat. Parvenus à ce point, il nous devient particulièrement difficile de discerner ce qu'on entend somme toute par le terme de « civilisé » [...]. Peut-être recourra-t-on d'abord à l'explication suivante : l'élément culturel serait donné par la première tentative de réglementation de ces rapports sociaux. Si pareille tentative faisait défaut, ceux-ci seraient alors soumis à l'arbitraire individuel, autrement dit à l'individu physiquement le plus fort qui les réglerait dans le sens de son propre intérêt et de ses pulsions instinctives. Et rien ne serait changé si ce plus fort trouvait plus fort que lui. La vie en commun ne devient possible que lorsqu'une pluralité parvient à former un groupement plus puissant que ne l'est lui même chacun de ses membres, et à maintenir une forte cohésion en face de tout individu pris en particulier. La puissance de cette communauté en tant que « Droit » s'oppose alors à celle de l'individu, flétrie du nom de force brutale. En opérant cette substitution de la puissancecollective à la force individuelle, la civilisation fait un pas décisif. Son caractère essentiel réside en ceci que les membres de la communauté limitent les possibilités de leur plaisir alors que l'individu isolé ignorait toute restriction de ce genre. Ainsi donc la prochaine exigence culturelle est celle de la « justice », soit l'assurance que l'ordre légal désormais établi ne sera jamais violé au profit d'un seul. Nous ne nous prononcerons pas sur la valeur éthique d'un tel « Droit ». Poursuivant son évolution, la civilisation semble alors s'engager dans une voie où elle tend à ne plus faire du droit l'expression de la volonté d'une petite communauté — caste, classe ou nation — celle-ci se comportant à son tour, à l'égard d'autres masses de même genre mais éventuellement plus nombreuses, comme un individu prêt à recourir à la force brutale. Le résultat final doit être l'édification d'un droit auquel tous — ou du moins tous les membres susceptibles d'adhérer à la communauté — aient contribué en sacrifiant leurs impulsions instinctives personnelles, et qui d'autre part ne laisse aucun d'eux devenir la victime de la force brutale, à l'exception de ceux qui n'y ont point adhéré.
La liberté individuelle n'est donc nullement un produit culturel. C'est avant toute civilisation qu'elle était la plus grande, mais aussi sans valeur le plus souvent, car l'individu n'était guère en état de la défendre. Le développement de la civilisation lui impose des restrictions, et la justice exige que ces restrictions ne soient épargnées à personne. Quand une communauté humaine sent s'agiter en elle une poussée de liberté, cela peut répondre à un mouvement de révolte contre une injustice patente, devenir ainsi favorable à un nouveau progrès culturel et demeurer compatible avec lui. Mais cela peut être aussi l'effet de la persistance d'un reste de l'individualisme indompté et former alors la base de tendances hostiles à la civilisation. La poussée de liberté se dirige de ce fait contre certaines formes ou certaines exigences culturelles, ou bien même contre la civilisation.
Il ne paraît pas qu'on puisse amener l'homme par quelque moyen que ce soit à troquer sa nature contre celle d'un termite ; il sera toujours enclin à défendre son droit à la liberté individuelle contre la volonté de la masse. Un bon nombre de luttes au sein de l'humanité se livrent et se concentrent autour d'une tâche unique : trouver un équilibre approprié, donc de nature à assurer le bonheur de tous, entre ces revendications de l'individu et les exigences culturelles de la collectivité. Et c'est l'un des problèmes dont dépend le destin de l'humanité que de savoir si cet équilibre est réalisable au moyen d'une certaine forme de civilisation, ou bien si au contraire ce conflit est insoluble.
Sigmund FREUD, Malaise
dans la civilisation,
Vienne, 1929,
Paris, P.U.F, 1971, pp. 43–45.