L'oral de Saint-Cyr
Rapport des examinateurs (2000)


Examinateurs : M. BALCOU Jean et LE PESTIPON Yves

" La discipline, c'est d'aimer ce qu'on aime "
Georges PERROS - Papiers collés

Le français est une discipline nécessaire, captivante, mais beaucoup de candidats à Saint-Cyr négligent de s'y exercer. Leurs prestations sont donc souvent insuffisantes. Ce rapport a pour but de les améliorer en donnant une description simple de l'épreuve.

  1. La préparation dans la salle d'examen.

    1. Cette préparation dure 30', le candidat a à sa disposition un dictionnaire des noms communs et un dictionnaire des noms propres. On ne saurait trop conseiller la consultation intelligente de ce dernier. Ainsi, le poème "les fusillés de Châteaubriant", épisode de la Résistance, en eût été éclairé. Devant l'ignorance trop flagrante des grands noms comme ceux de Sartre ou de Malraux, il est également bon de se préparer, en cours d'année, quelques fiches sommaires. On peut donner les mêmes conseils pour les grands mythes de l'Antiquité Oedipe, Antigone, la Guerre de Troie, etc...).

    2. Les textes proposés se rapportent au XXème siècle. Il peut s'agir de textes dits d'idées, mais aussi d'une page de roman, d'un poème, d'une pièce de théâtre. On se reportera à la liste des principaux textes proposés reproduite ici.

      Il est clair que "l'analyse" du texte d'idées (du style argumentatif) et d'un texte plus "littéraire" (mais que dire d'un discours de Malraux ?) ne se traite pas forcément de la même manière.

  2. Première étape de l'épreuve (4' environ).

    Elle comprend la présentation de la situation du texte, de l'auteur; du moment, de l'œuvre, du genre. Elle ne doit, en aucun cas, être "expédiée", puisque l'enjeu de l'épreuve y est déjà annoncé, avec la problématique à résoudre.

    Exemple: le poème "Ce cœur qui haïssait la guerre" de R. Desnos, 1975.

    Le dictionnaire permet de préciser le rôle de Desnos avant et pendant la guerre, jusqu'à sa mort dans un camp.

    Ce qui signifie d'abord que 1975 indique une publication posthume (redécouverte de ce poète) ? Mais surtout le titre s'inscrit dans un recueil intitulé Destinée arbitraire : titre suffisamment excitant pour être commenté, et qui annonce le dilemme du pacifiste sommé d'entrer en résistance contre Hitler et ses partisans.

    Cette première étape consiste, dans un deuxième temps, à lire. La lecture est un élément d'appréciation non négligeable.

    Quand il s'agit d'un texte relativement court (un poème), le texte est à lire en entier.

    Quand il s'agit d'un texte long, il n'en faut lire qu'une page: au candidat d'expliquer son choix.

  3. Deuxième étape de l'épreuve (8' environ).

    Il s'agit de l'analyse. C'est-à-dire d'une description du texte aussi objective que possible. Non d'une explication linéaire, ni d'un résumé. Ni non plus d'un impossible compte-rendu exhaustif de tous les aspects du texte.

    On attend que le candide reformule, avec ses mots, l'essentiel de ce qui est dit, qu'il caractérise sa méthode, le genre et le style du texte, qu'il explicite les passages les plus délicats. Il faut éviter toute forme d'éparpillement des champs lexicaux qui fait éclater une structure à moins que le texte s'y prêt, comme tels "fragments" de Barthes, de Perros ou d'Apollinaire... Que la thématique soit toujours développée méthodiquement, tant l'essentiel consiste à voir d'où l'on part et où l'on aboutit. La progression des idées doit se reconstruire dans cette analyse. Au candidat de prouver qu'il a bien situé et compris le texte proposé. Tout cela en moins d'une dizaine de minutes.

  4. Troisième étape de l'épreuve (8' environ).

    Cette troisième étape suit immédiatement la précédente et elle doit lui être reliée par une transition souple: que l'on s'aperçoive qu'on passe à un autre plan. Rappelons, à cette occasion, que l'analyse ne prenait en compte que le texte même et que le moindre commentaire est de trop. Réservons-le pour cette troisième étape où le candidat doit présenter, à partir du texte, un développement personnel argumenté.

    Il devra donc se soucier, d'abord, de trouver dans le texte un ou plusieurs éléments (mais à homogénéiser) susceptibles de susciter débat. Le jury n'aime pas qu'on lui serve, sans lien explicite avec le texte, des argumentaires tout faits sur des thèmes extrêmement généraux: cette année, Platon était naturellement en première ligne, à propos de tout et de rien ! Qu'on se garde aussi de se précipiter sur l'actualité la plus brûlante quand cela n'a rien à voir avec le propos. Il est enfin incongru et peu efficace de s'attarder sur les détails trop personnels.

    Le jury souhaite, en revanche, que l'on choisisse un aspect très précis du texte et qu'on puisse l'analyser aussi loin que possible. Le candidat, une fois son sujet choisi, devra se soucier de construire très vite un plan argumenté: quelques idées, quelques exemples, un raisonnement. Ce qui doit aller de pair avec l'ouverture d'esprit et la conscience des enjeux. Ainsi tel candidat ayant affaire au poème d'Aragon "Je vous salue ma France" a su problématiser les relations entre communisme et patriotisme.

    La qualité de l'expression orale, qui fut généralement de bonne tenue, est, dans cette partie de l'épreuve, comme dans les autres, déterminante.

  5. Quatrième étape de l'épreuve (10' environ).

    Pendant les 10 dernières minutes de l'épreuve se déroule un entretien. Il s'agit, par quelques questions, d'amener le candidat à préciser ce qu'il a voulu dire, à corriger quelques erreurs, ou à proposer d'autres perspectives plus riches. Toutes sortes de questions peuvent être posées. Elles ne cherchent pas à piéger le candidat, mais à lui donner l'occasion de manifester sa culture (en particulier littéraire et historique), son sens de la répartie, son aptitude au dialogue courtois, sa capacité à défendre une idée ou à la relancer. L'esprit de disponibilité intellectuelle du candidat, son dynamisme, sa bonne humeur sont appréciés.

  6. Conclusion.

    L'épreuve de français exige des connaissances, une préparation, de la volonté. Elle mobilise de nombreuses aptitudes, dont celles d'adaptation, voire d'improvisation, et souvent un certain courage intellectuel. Les candidats, qui la réussissent, mettent en œuvre avec éclat les qualités attendues de l'officier.

LISTE DES EXTRAITS PROPOSÉS

Anouilh

Antigone

Antelme

L'espèce humaine

Apollinaire

Alcools

Aragon

Le Crève-cœur

Barthes

Mythologies
Le bruissement de la langue

Baudrillard

De la séduction

Beauvoir

Le deuxième sexe
Mémoires d'une jeune fille rangée

Bernanos

Journal d'un curé de campagne

Cadou

Pleine poitrine

Camus

L'étranger
La peste

Cazeneuve

La vie dans la société moderne

Céline

Voyage au bout de la nuit

Char

Fureur et mystère

Chesnais

Histoire de la violence

Cioran

Précis de décomposition
Syllogismes d'amertume

Debray

La puissance et les rêves

De Gaulle

Mémoires de guerre

Delumeau

Des religions et des hommes

Desnos

Destinée arbitraire

Eluard

Au rendez-vous allemand

Gide

Thésée
Œdipe

Giraudoux

La guerre de Troie n'aura pas lieu

Le Guillou

Passage de l'Aulne

Lévi-Strauss

Triste tropiques
Race et histoire

Loti

La mort de Philae

Malraux

Antimémoires

Michaux

Plume
Lointain intérieur

Pérec

Penser / Classer les choses

Perros

Papiers classés

Proust

A la recherche du temps perdu

Saint-Exupéry

Citadelle
Terre des hommes

Sartre

Les mots
Les mains sales

Senghor

Chants d'ombre

Sollers

Femmes
Passion fixe

Tournier

Le vol du vampire

Valéry

Variétés

Vercors

Le silence de la mer